vendredi 12 août 2016
Un lourd couvercle de nuages gris recouvre Moscou
aujourd’hui, alors que nous nous levons de bonne heure : il est temps
d’aller explorer le centre-ville ! Levés en traînant les pieds, nous avalons
rapidement pain et kolbasa (un saucisson façon russe qui pourrait se faire
passer pour un saucisson à l’ail bien français, haleine fruitée y compris), un
thé pour la route, avant de nous presser vers la station.
A l’arrivée du train au terminus
de la ligne Kourski, qui est l’une des sept grandes gares de la capitale, nous achetons
notre ticket auprès d’Irina, une contrôleuse à l’allure peu commode, comme son
rôle semble l’exiger. Celle-ci se révèle être au final être presque sympathique,
aberration que Macha ne manque pas de remarquer, sans savoir qu’elle n’est pas
au bout de ses surprises…
Notre première étape est un grand
bâtiment abritant une banque, où nous apprécions la modernité des lieux, une
bonne partie des services semblant avoir été automatisée depuis la dernière
visite de Macha, il y a près de deux ans. Tout va très vite, et les employés
sont d’une amabilité telle que Macha en est toute interloquée : « les
gens sont polis, je ne sais pas ce qui se passe, quelque chose a changé en
Russie ».
Et effectivement, à mesure que
nous parcourons les rues en direction du centre après un rapide encas au Grabli,
Macha me fait remarquer de nombreux détails témoignant de l’évolution de
la ville : les voies piétonnes s’élargissent, de nombreuses terrasses à l’européenne
fleurissent devant les restaurants, les petites boutiques tenues généralement
par des immigrés ont disparu de la plupart des souterrains, la mendicité est
quasi invisible, la ville ne semble plus aussi cosmopolite qu’auparavant…
Tout à ces réflexions, nous descendons
la Tverskaya, immense avenue menant au Kremlin sur laquelle ont généralement
lieu les défilés militaires, et atteignons le célèbre magasin Eliseevskiy.
Ce magasin a comme particularité
d’être installé dans un palais datant du début du XIXème siècle, qui n’a pas
bougé depuis les années vingts. La décoration intérieure est sublime, on reste
émerveillé devant les lustres, plafonds ouvragés et ornements Art Nouveau qui
tranchent un peu avec les produits mis à la vente. Les désodorisants côtoient
les statues anciennes, les rayons de friandises s’étendent à perte de vue tandis
qu’un portrait d’Eliseev, fondateur du magasin ouvert en 1901, adresse à une
assemblée de pastèques un regard empli de bienveillance paternelle. Nous
profitons de l’endroit pour faire provision des poissons à l’odeur démoniaque fumés et séchés que nous adorons, avant de reprendre notre chemin vers le
Kremlin.
La présence de légions japonaises
nous signale notre entrée dans la zone touristique de la ville, alors que sur
notre gauche le fondateur légendaire de Moscou, Youri Dolgorouki, nous toise du
haut de son piédestal. Devant les hordes de touristes et les files d’attente
sans fin, nous décidons de reporter notre visite du Kremlin à la fin de notre
séjour, et de partir explorer les alentours, que Macha connaît bien.
Le quartier est riche en
personnalités phares : nous tombons bientôt sur une statue du metteur en
scène Stanislavski, dont l’école de théâtre se trouve à deux pas du théâtre de
Tchekhov. Celui-ci monte la garde non loin de là, les traits figés, sûrement
outré de voir son établissement impunément masqué par la terrasse d’un bar
portant son nom.
Non loin de l’entrée de la Place Rouge, nous arrivons juste
à temps pour observer la relève de la garde, c’est-à-dire des deux militaires
gardant le « feu éternel », qui commémore la victoire de la Grande
Guerre Patriotique (connue également sous le nom de Seconde Guerre Mondiale).
Plus loin, nous apercevons le siège de la Douma, le gouvernement russe, logé
dans un immeuble à l’allure aussi avenante et chaleureuse que le Président
lui-même. Cette vision sinistre ne dure qu’un temps heureusement, car notre
regard se pose bientôt sur une sympathique collection de statues évoquant
fables et contes connus, non loin d’une majestueuse fontaine surmontée de
quatre destriers. Nos pas nous mènent ensuite devant le célèbre Théâtre du
Bolchoï, devant lequel trône une statue de Karl Marx ornée de la fameuse
citation : « Prolétaires de tous pays, unissez-vous ! ».
Nous pénétrons ensuite sur la Place Rouge, qui malheureusement est encombrée de structures en gradins ainsi que diverses installations peut-être mises en place pour l’improbable « Festival de la confiture », qui empêchent d’apprécier pleinement la vue sur l’ensemble de la place et des murailles de la forteresse, masquant en partie le tombeau de Lénine et même St Basile. Nous dépassons bientôt cette dernière, qui est vraiment splendide, sous une pluie fine qui commence à tomber.
La fatigue commençant à se faire sentir, nous décidons
d’aller déjeuner à la Cantine n°57 (Stolovaya №57). Il s’agit d’une ancienne cantine
soviétique qui a été conservée en l’état, en dépit de quelques modernisations
discrètes. Après une queue qui ne s’éternise pas, on profite d’une très bonne
cuisine, très variée, très abordable, et typiquement russe (j’ai testé pour
vous et je recommande : le mors (boisson au jus de canneberge), les kotleti de champignons, les pirojki (pâte farcie à la viande ou légumes), et les tomates
marinées façon malosol). La décoration reproduit fidèlement les modèles de
l’époque, des ornementations en marbre aux tenues des employés en passant par
les nappes en plastique imitation dentelle. Pas de fond musical, pour garder
l’ambiance cantine, mais des petits poèmes sur les tables pour inviter les
clients à aider au débarrassage.
Ce restaurant/cafétéria se trouve au dernier étage de la galerie commerciale « Goum », ouverte par le tsar Alexandre III à la fin du XIXème siècle et qui n’a pas tant changé depuis. L’ambiance du lieu est des plus agréables et on s’étonne même d’y trouver des enseignes contemporaines. Macha m’indique qu’une partie des galeries est à visiter à tout prix (en l’occurrence 150 roubles, soit moins de 2 euros) : il s’agit des toilettes dites « historiques », qui ont été restaurées à leur état originel… Après avoir réglé la somme due et récupéré le ticket d’entrée auprès de la dame en uniforme assise à un splendide bureau, on se met dans l’ambiance tandis que des haut-parleurs diffusent une version symphonique du traditionnel « Katiouchka ».
Des serviettes impeccablement empilées attendent lascivement l’usager qui
voudra bien s’essuyer les mains après les avoirs lavées dans les lavabos aux
pourtours de marbre… On s’y sent tellement bien qu’on y resterait, mais la
réalité me rattrape vite : Macha m’attend pour la suite de la visite !
Après être allés récupérer les papiers prouvant que l'administration russe me connaît, nous profitons de la partie métro
du trajet retour pour visiter les stations les plus anciennes de Moscou, celles
qui forment le « cercle » qui permet de passer facilement d’une ligne
à l’autre. Des citations de Pouchkine à Pouchkinskaïa, des mosaïques reprenant
les grandes scènes de l’histoire soviétique, une station romaine, affichant
Remus et Romulus… On découvre les statues de bronzes de révolutionnaires
abrités dans les arcades de Plochtchad Revolioutsii (Place de la Révolution).
Il est dit que caresser le museau du chien qui accompagne l’un d’eux porte bonheur,
et nous observons certaines personnes achever de lui polir le nez – certains font
même le détour au sortir de la rame pour aller le toucher. Le réseau de la
capitale russe n’a pas la réputation de plus beau métro du monde pour rien :
la station moscovite la plus sobrement ornementée ferait passer l’ensemble du
métro parisien pour une section abandonnée de la ligne Maginot.
Demain et les 3 jours qui vont suivre,
nous quittons Moscou pour la ville de Taroussa, puis passons 3 jours dans la
communauté de Kitèje! Stay tuned pour de nouvelles découvertes :)
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